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Exposition Spirit of the Cities

28 novembre 2008

. . . . . Mr M.N. Sharma, sa femme (portrait

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Mr M.N. Sharma, sa femme (portrait peint), sa maison, Yojna...

Tout le monde est triste en Inde aujourd’hui, les rues sont exceptionnellement vides et on ne parle que des événements de Bombay.

L’hôtel du Taj face à Gateway of India, est le lieu le plus symbolique de l’Inde peut-être après le Taj Mahal.

Tout le monde dit la même chose, sur le mode de la colère ou de la tristesse… qu’ils ont  peur que cela brise l’harmonie entre les communautés, la diversite des identites qui est l’identite de l’Inde, qu’ils ne comprennent pas pourquoi l’Inde a été la cible.

La TV montre en boucle l’hôtel qui brûle, les militaires… c’est sinistre. J'ai appris la nouvelle a minuit, en temps réel en rentrant de l'aéroport d'ou Benoit partait pour Paris.

J’ai souvent déjeuné dans ces lieux avec Parimala ou seul lorsque j’étais à Bombay, c’était des endroits magnifiques dont le calme et la douceur fera désormais partie des souvenirs.

Je suis à Delhi depuis hier midi.

A 6 heures du matin j’ai pris le train à Chandigarh. Le train a traversé la plaine du Penjab et j’ai dévoré des yeux le paysage matinal, dans le brouillard et les premiers rayons de soleil avec ces silhouettes drapées dans des couvertures jaune, oranges, roses, avec des turbans verts et rouges sur des bicyclettes ou sur les quais de gares… les petits enfants emmitouflés, les valises… c’était tout simplement un film antique en technicolor.

L’arrivée dans Delhi, est frappante. On traverse des quartiers désolés… puis on arrive dans l’effervescence du centre avec les taxis, les temples qui fument, les gens qui font leur toilette sur les toits…

Mon séjour à Chandigarh a été court. Deux jours et demi. Cette ville de Le Corbusier au pied de l’Himalaya est bizarre. Ces mêmes silhouettes antiques, ces turbans sur fond de façades modernistes sont un régal pour les yeux.

Je l’ai vue différente que le souvenir que j’en avais gardé.

Je ne me souvenais pas d’autant d’espaces vides entre les secteurs.

J’y ai photographié, Shiv Singh, un artiste contemporain âgé, vêtu de noir du turban jusqu’au chaussures, une metteur en scène, le directeur de la fondation Le Corbusier, un sikh français avec sa femme, un artiste photographe, deux étudiants en art, un jeune joueur de Tabla et mon meilleur souvenir de mon passage à Chandigarh cette année : M. N. Sharma.

Il était le bras droit de Le Corbusier lors de la construction de Chandigarh. Il a construit la maison d’Indira Gandhi, a travaillé pour Nehru, a connu Louis Khan et tous les grands architectes du XX eme siècle. C’est un homme d’une intelligence exceptionnelle. Ses yeux voient tout.

Déjà très âgé en 2002 il avait inauguré mon exposition. Le lendemain il m’avait invité à boire un thé chez lui. Cette année j’ai demandé timidement s’il était toujours en vie.

On m’a dit que sa femme était décédée mais que lui était toujours vivant.

Je lui ai téléphoné et il m’a dit venez demain à midi précise. Je comprends que quand on est presque centenaire on ait plus trop envie d’attendre.

Il m’a reçu dans un superbe costume crème, très droit dans sa villa qui est l’une des plus belles maisons que je connaisse. Une maison d’architecte, tout y est pensé, chaque angle de mur, de fenêtre, chaque couleur… les murs sont couverts de peintures et de céramiques de Le Corbusier.

Au début la conversation était formelle, puis il s’est rappelé que j’étais l’artiste qui avait réalisé Fûdo, et il m’a stupéfait en me décrivant de mémoire et avec enthousiasme les différents paysages de Fûdo. Tout était dans sa mémoire… puis nous avons commencé à discuter avec de plus en plus de chaleur, en parlant des amis artistes qu’il connaissait et que j’avais photographié à Calcutta.

Yojna, une amie commune nous a rejoint et peu à peu ce monsieur grave et sérieux ravi de voir que mon intérêt pour son esprit était réel et que je ne venais pas le voir comme un monument de Chandigarh est devenu de plus en plus joyeux, il m’a aidé à photographier sa maison dans tous les sens, ressortait les maquettes de tiroirs, les dessins de Le Corbusier, tirait les meubles… me montrait le portrait peint de sa femme qui était « la plus belle femme de Lahore »… ses photos avec Nehru, I. Gandhi, Sonia Gandhi etc.

A la fin il chantait tant il était joyeux de partager tout ça et moi j’étais ravi.

C’était magique de transporter dans le jardin des peintures de Le Corbusier pour les photographier à la lumière naturelle avec ses commentaires sur chacune des pièces !

Tout un monde, celui des années 50, du modernisme, de la recherche de la forme, de l’utopie des villes réussies… radieuses.

Un monde d’une incroyable modernité et d’une pureté oubliée.

Chaque fois que je photographie de vieux artistes, je médite sur ma condition. Et c’est un des moments où je suis à la fois heureux et mélancolique d’avoir fait ce choix. C’est difficile à définir.

Ces vieux artistes entourés de leurs œuvres sont à la fois vulnérables, légers, fatigués et d’une extrême fragilité. Ils ont bâtie leur œuvre face au néant qui nous entoure tous, et cet affrontement au néant les a rendus presque immatériels. Mais ils ont tellement lutté pour construire morceaux après morceaux une harmonie à peu près aussi solide qu’un château de cartes, qu’ils redoutent plus que tout quelque chose que je pourrais nommer la vulgarité…

La simplification, la brutalité du monde comme dit Putman. Car les œuvres d’art n’offrent aucune résistance à la vulgarité de l’esprit et la brutalité des Hommes.

Nous avons ensuite déjeuné ensemble dans sa salle à manger, puis j’ai visité le Parlement au soleil couchant, accompagné de soldats armés, d’une grande gentillesse. Cela m’a rappelé la visite du Parlement à Dhaka au mois de mars.

J’ai du passer dans 5 bureaux pour faire tamponner des autorisations puis les autorisations des autorisations, avec des piles de paperasses, et des sikhs enturbannés dans ce décor de perspectives et de vitraux colorés. Ca aussi c’était un régal pour les yeux.

Depuis que je suis à Delhi je travaille sans cesse. Je suis très bien accompagné par un chauffeur, une assistante très efficace et la directrice de l’AF…  je vais de séances de photos en séances de photos.

A midi je déjeunais avec une Top model, en col roulé noir avec qui nous avons vidé une bouteille de vin en parlant des attentats.

Son intelligence et sa gentillesse la rendait beaucoup plus belle que son image. Je l’ai photographiée au antipodes des séances de mode, triste et ramassée sur elle-même. Elle a pris cela comme un hommage à son intelligence. Elle avait raison.

Ensuite sur la pelouse d’un Palace, j’ai photographié le Jacques Séguela indien… et je continue demain avec des écrivains, un défenseur des droits gays, un immense musicien classique, un historien et une critique de cinéma…

…………….

Ce matin

Je viens de passer une matinée extraordinaire chez le plus grand maitre de la musique classique indienne Ustad Amjad Ali Khan ! L’un des rendez-vous les plus mémorables de ma vie d’artiste, je crois. J’essayerai de prendre un peu de temps pour raconter.

Tout le monde ne parle que de THE WAR, et les jours passant l’Inde est de plus en plus traumatisee.

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24 novembre 2008

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Bhopal est au centre de l’Inde, au milieu de mon séjour en Inde, et c’est ici que nous nous sommes retrouvés avec Benoît et Parimala.

C’était une bonne idée, d’abord parce-que la ville est calme, et que l’hôtel, une ancienne résidence de la famille princière de Bhopal est propice pour partager d’heureux moments. 

 

Bhopal a été une bonne surprise, car le nom n’évoque pour la plus part, comme pour moi jusqu’à la semaine dernière, que l’explosion de l’usine chimique américaine et les milliers de morts.

Je repars avec des matériaux bien différents.

Un portrait de Balthazar de Bourbon, héritier de la couronne française. Un portrait du Nawab et de la Bégum de Bhopal (le Roi et la Reine !), le portrait d’un artiste peintre, celui d’un poète … des photos des peintures rupestres de l’âge de Lascaux, et des peintures tribales des abords de Bhopal.

 

D’abord j’ai été reçu avec beaucoup de chaleur par le directeur de l’AF de Bhopal et sa femme qui m’ont rendu le séjour et le travail très fluide et favorable à la réalisation d’un bon travail à venir.

Si je dois retenir quelques moments à Bhopal, cette semaine, il y a la rencontre avec Balthazar de Bourbon, la branche des Bourbon indiens qui descendent en droite ligne d’Henri IV.

L’ancêtre de Balthazar de Bourbon, Jean-Philippe de Bourbon a fui la France à la suite d’un duel, il est passé par l’Egypte, Goa, est devenu une éminence grise à la cour d’Akbar à Fathepur Sikri, il a renoncé au trône en France, et ses descendants sont venus s’installer à Bhopal où ils vivent toujours aujourd’hui. (il existe un livre de Michel de Grèce qui raconte cette histoire)

Balthazar de Bourbon, a cela d’intéressant c’est qu’il habite parfaitement son personnage. Cravate et boutons de manchettes couverts de fleurs de Lys, il raconte l’histoire romantique de sa famille avec beaucoup de passion et d’humour.

Je l’ai fait poser en train de lire les Liaisons dangereuses de Laclos.

J’ai présenté son portrait dans l’exposition, et la photo d’un journaliste a été reproduite dans la presse, où on le voit en compagnie de sa femme vêtue d’un sari jaune, en train de contempler son portrait lors du vernissage.

 

Grâce à Roopam, j’ai pu entrer en contact avec les descendants de la famille royale de Bhopal, Sonia et Naveen.

Bhopal du début du XIX e siècle jusqu’à 1926 a la particularité d’avoir été gouverné par des femmes (les Bégums de Bhopal célèbres en Inde) qui ont développé, l’éducation, la culture et une grande harmonie entre hindous et musulmans.

La veille de la prise de vue, Sonia de retour de Bombay nous a retrouvé dans le bar de l’hôtel où nous buvions un verre, Parimala, Benoît et moi pour savoir, je pense, qui j’étais, puis comment ils devaient se vêtir, quels bijoux elle devait porter etc.

 

C’est étonnant lorsqu’on voit les portraits des ancêtres accrochés au mur et cette femme, qui ressemble à Claudia Cardinale, en jean et petite veste mais avec une classe et une élégance extrême.

Le lendemain une voiture est venue nous chercher à l’hôtel à midi pour nous conduire, Parimala et moi à leur Résidence qui surplombe le lac. C’est une immense villa avec des pergolas et des statues de lutteurs de la Renaissance qui m’a fait penser aux villas italiennes qui surplombent les lacs italiens.

 

Tout était d’une élégance, d’autant plus impressionnante qu’elle n’est absolument pas tapageuse. Sonia avait revêtu pour l’occasion une kurta mauve taillée dans un ancien sari brodé de perles. Son mari, lui, avait quelque chose d’Onasis.

Les meubles sont en rotin, les colonnes peintes en gris anthracite et les murs blancs.

Nous avons parlé sur la terrasse, devant un plateau de thé et de gâteaux, des miniatures indiennes, du renouveau semble-t-il des miniaturistes à Lahore au Pakistan, de leurs enfants qui étudient à Bombay etc. Parimala était très impressionnée d’être reçue chez la Bégum et le Nawab de Bhopal et du coup je l’étais encore plus ! Je suis toujours surpris depuis 10 ans que je viens travailler en Inde, d’avoir accès à des moments comme celui-ci, et de voir combien des moments exceptionnels comme celui-ci s’enchaînent naturellement.

Sonia et Naveen se sont prêtés avec bonne humeur à la séance de photos. Maintenant il me reste à réaliser leur portrait inspiré par l’iconographie des miniatures mogholes.

 

Avec Parimala, nous avons parlé sans arrêt mais sans précipitation pendant 48 heures. Comme deux amis qui savent qu’ils se reverront toujours sur ce mode. L’après-midi en marchant dans les rues de Bhopal explosées et en revenant du musée tribal, le soir en prenant l’apéritif dans le bar sombre du Jehan Numa Palace, nous rions de considérer le romanesque de la situation. « One night in Bhopal », les retrouvailles de deux français et d’une indienne, dans cette belle ville historique et poussiéreuse du centre de l’Inde, d’où nous repartirions le lendemain chacun pour une autre ville ; Parimala pour Pune, Benoît pour Goa, et moi pour Chandigarh…

Lorsqu’on regarde la carte de l’Inde, on n’imagine jamais, mais en regardant la billet de train de Parimala j’ai lu « distance du trajet 1566 km ». Sur la carte Pune et Bhopal semblent dans la même région alors que la distance doit être à peu près équivalente à Madrid Paris.

 

Un autre très bel après-midi a été lorsque, avec Benoît et Gill la femme du directeur de l’AF, nous sommes partis au sud de Bhopal dans la campagne sèche et par des routes minuscules retrouver un immense Temple du XI eme s dédié à Shiva., avec à son centre un lingam haut comme un immeuble. Ce beau temple rouge, perdu dans la campagne avec l’encens qui fume et les pigeons qui volent tout autour est toujours très habité.

 

Quelques kilomètres plus au sud sur une colline déserte, nous nous sommes promenés dans l’équivalent des grottes de Lascaux indien. Ce sont des cavernes ouvertes, à l’air libre, avec des dessins extraordinaires du néolithique, des troupeaux de bisons qui courent, d’éléphants et de singes représentés il y a quelques milliers d’années, pendant qu’au coucher de soleil des grappes de singes réels se jettent d’un arbre à l’autre au dessus de nos têtes dans un paysage intact. Si un mammouth ou une famille couverte de peaux de bisons étaient apparus dans les herbes jaunes, j’aurais trouvé ça presque plus naturel que de retrouver le 4x4 qui nous attendait au bout du chemin.

 

Tout en haut de la colline, à la nuit tombée, nous sommes entrés dans un temple éclairé par des bougies, et creusé dans le rocher. Deux prêtres bonhommes, dans leurs longhis oranges nous ont bénit en nous posant du pigment rouge sur le front. Le prêtre nous a raconté que le matin à 5 heures, il méditait tout en haut du rocher face à l’immense plaine ouverte qui se déploie sur des centaines de kilomètres en dessous de lui. J’imaginais les moments de plénitude et de plaisir auxquels il doit accéder certains matins dans cette brousse couverte de singes face au gros soleil orange qui se lève sur l’Inde.

 

Depuis cet après-midi je suis à Chandigarh.

A chaque changement de ville, j’ai un moment d’adaptation. Les personnes avec qui je travaille, ont des personnalités différentes. Les équipes travaillent différemment. Les villes n’ont rien à voir et les indiens d’une région à l’autre sont forts différents aussi. Entre ce matin et ce soir c’est un peu comme si j’étais passé du Pays Basque espagnol à la Hongrie.

Mais je suis dans le Penjab, et les penjabi me sont sympathiques… alors le passage devrait bien se dérouler.

Au dessus de Chandigarh, la chaîne de l’Himalaya est enneigée.

 

 

 

15 novembre 2008

Avantika Poddar Somesh Kumar Bientôt une semaine

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Avantika Poddar

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Somesh Kumar

Bientôt une semaine que je suis à Bangalore.

L’arrivée à Bangalore depuis les rizières du Tamil Nadou un dimanche soir à 20 heures est à la fois effrayante et fascinante.

Il est en train de se tisser autour de Bangalore un réseau de ponts, d’autoroutes à 4 ou 6 voies en toile d’araignées. Aujourd’hui une seule voie fonctionne et le reste est en travaux.

Cela donne l’impression que la terre s’est ouverte, il y a des machines partout, d’énormes crevasses, des ponts inachevés en béton avec des villages en feuilles de palmier tissées qui se sont construits dessous.

Les journées à Bangalore sont simples. Je travaille de 9 h 30 à 17 heures tous les jours, à l’Ecole d’Art et de Design Srishti. C’est une école luxueuse, moderne, avec une architecture de cubes jaunes et blancs. Parmi mes etudiants il y a des personnes qui viennent de partout, dont une finlandaise.

Les étudiantes indiennes, pour s’habiller, vont avec aisance du sari au treillis avec pataugas, châles de soies de Bénarès etc. J’aime ce mélange que gardent les jeunes même les plus branchés de l’Inde.

Pour les garçons ca va de la chemise hawaïenne à la kurta brodée de perles. Du coup, hier je suis venu en costume !

Le port du sari en Inde, est une chose que je regarde toujours avec le même intérêt. Je pense que c’est le seul vêtement venu de l’antiquité (c’est une sorte de toge romaine) qui se retrouve  porté par des millions de femmes contemporaines. Lorsque je vois une femme vetue de cet immense tissus savamment enroulé prendre le volant de sa voiture, j’ai l’impression de regarder Cléopâtre se mettre aux manettes d’un vaisseau spatial.

Ce qui m’intéresse à Bangalore, avec ce travail à l’Ecole des Beaux-Arts, c’est que j’expérimente la vie d’un prof d’art à peu près normal.

Je suis logé dans un grand appartement de fonction du centre ville.

Par contre, ce qui me surprend toujours après 10 ans de frequentation de l’Inde, c’est le partage du travail. L’Ecole me paye pour enseigner les rapports de la peinture et de la photographie aux étudiants en regard avec mon propre travail. Du coup ils ont tout pris en charge à côté pour que je ne fasse que ça.

J’adore cela et je travaille deux fois plus, car je ne pense à rien d’autre, même si cela peut être parfois loufoque. Si je m’en étonnais ouvertement ils ne comprendraient pas. Alors je fais ce qu’on attend de moi, avec plaisir.

C’est à dire que le matin un monsieur en costume, vient me préparer mon petit déjeuner, faire couler mon bain, recharger mon téléphone. Ensuite une femme vient faire le ménage et laver le linge. Un autre homme s’occupe du repassage.

Puis, Pala l’incroyable chauffeur qui ressemble à Charlie Chaplin, pour le physique et la vivacité d’esprit, m’accompagne partout, ferme la porte à clé, vérifie si j’ai pris tous mes dossiers…

Tous les soirs, après le travail il me conduit en centre ville pour goûter dans une pâtisserie où je mange deux Gulab Jamul (sorte de baba au rhum qui baignent dans le miel) et un lassi. Ensuite je passe parfois dans les temples car c’est l’heure des pujas, et que j’aime regarder les Dieux enveloppés dans les fumées d’encens et les masses de fleurs au fond des grottes de pierre à la nuit tombée.

L’autre jour Pala m’a fait rire, car je l’ai entendu répondre de loin à quelqu’un qui lui demandait d’où je venais, que j’étais français mais hindou !

Je lui ai demandé pourquoi il avait dit ça ? Il a trouvé bizarre que ca m’étonne...

Dans la voiture pour passer le temps dans les embouteillages, je lui demande de me raconter la généalogie des quelques centaines de Dieux et Déesses. J’adore voir avec quelle passion il me parle de ca en faisant les gestes de Krishna jouant de la flûte, de Parvati qui dodeline etc.

Shiva est le père de Ganesh, Parvati est la femme de Shiva etc., Shiva a seulement deux fils Ganesh et... qui… Ensuite il me dit : tu t’en souviendras pour expliquer à tes parents, tes frères et tes amis ?

Après le goûter il va m’acheter à dîner et m’installe sur une chaise pendant qu’il fait les commandes, paye la caisse etc. Je lui ai demandé si je ne pouvais pas aller à l’appartement pendant qu’il commandait les dîners, car je ne faisais rien. Il s’est offusqué et j’ai senti que ce n’était pas une bonne idée.

Il me raconte sa vie, depuis son village très pauvre jusqu’à Bangalore, et il décrit sa vie actuelle en disant je suis si heureux d’être si heureux maintenant !

Puis, pour illustrer cette jolie phrase il fait une liste de tout ce qui le rend heureux, et c’est une sorte de long poême à la Sei Shonagon (la poétesse japonaise qui faisait des listes).

Je trouve cela extraordinaire, la capacité des indiens à être heureux, c’est bien la limite des occidentaux qui se trompent souvent lorsqu’ils se projettent à la place des indiens et s’imaginent malheureux. Ce qui m’intéresse de mon côté, c’est de comprendre ce qui est important pour lui et ne le serait pas pour un égyptien ou un chinois. Comment il a construit sa vie pour dire cette jolie phrase. Et puis je pense toujours que l’hindouisme est une religion qui malgré un certain nombre de défauts offre à l’homme un degré de civilisation, de souplesse et une vision du monde très favorables au bien-être et à la réalisation mentale et physique.

Ce matin je vais retrouver mes étudiants, et regarder les tirages. Ce qui m’a intéressé dans ce workshop, outres le plaisir d’enseigner en Inde qui est devenu assez familier, c’est que cette fois j’ai essayé de les faire travailler sur la peinture indienne, les peintures de Tanjore avec métal et pierres incrustées, les miniatures Moghols, les peintures tibétaines etc.

Tous les matins lorsque la voiture se met en route j’éprouve le même plaisir, car la route en Inde, par la multitude de détails qui se succèdent diffuse doucement de la bonne humeur. Les familles de 4 enfants qui portent tous des lunettes noires accrochés à leur père sur une même moto, les hommes qui tressent des guirlandes de fleurs au milieu des embouteillages, les jeunes femmes au volant de leur Maruti, les jeunes ingénieurs sur leur moto qui balancent la tête pour me dire bonjour, les prêtres torses nus, en longhi avec le trident de Shiva peint sur le front, assis en amazone derrière un informaticien en moto… les singes qui dorment sur les toits des bus, le tableau de bord du bus de ville avec 7 geraniums allignes, et de l’encens qui fume... tout est à la fois comique et réjouissant comme dans un film de Fellini.

10 novembre 2008

Le temple d'Hanuman Jean Ma maison à Pondichéry

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Le temple d'Hanuman

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Jean

Ophelia
Ma maison à Pondichéry

Voilà la semaine à Pondichéry derrière moi.

Pondichéry ressemble à un rêve d’après les colonies. Tout est charmant.

La terrasse de la villa où était accrochée mon exposition donnait sur la jetée, avec la statue de Duplex. Un petit peu plus loin il y a celle de Gandhi.

Les bâtiments des Travaux publics sont noyés dans les bougainvilliers, l’Ecole Française d’Extrême Orient avec les bibliothèques du début du siècle, le Consulat, le Lycée français, la rue Alexandre Dumas, la rue Romain Roland etc.

Le bungalow où je séjournais était l’ancienne résidence du directeur de l’Ecole d’Extrême Orient. J’imaginais quel pouvait être son travail dans ces murs il y a quelques décennies au milieu des archives et des clichés des sculptures des temples Dravidiens.

J’y ai retrouvé Jean Deloche, un savoyard de 80 ans, que j’avais rencontré en 2002, j’aime beaucoup ce monsieur et pris des clichés pour réliser plus tard son portrait. Il travaille depuis les années 50, sur les forteresses du sud de l’Inde et nous avons passé une matinée magnifique dans son bureau à regarder des fresques murales rouges, bleues et dorées qu’il a découvert il y a peu au sud de l’Inde.

Il me donne envie de lui ressembler à 80 ans, lumineux, joyeux et mélancolique à la fois, toujours curieux. Il s’est installé avec sa femme à quelques kilomètres de Pondichéry dans un village de pêcheurs qu’il rejoint sur sa moto. Sa femme qu’il adore depuis 50 ans, et avec qui il est arrivé en Inde à travers l’Afghanistan, l’Iran des années 50… écrit des livres.

Chacune de ses phrases, est baignée de bon sens, car je pense qu’il a guidé sa vie avec un grand soucis d’harmonie. J’ai retenu l’une d’elle qui m’a plu lorsqu’il m’a dit « tu sais on ne vit pas de beauté mais de convivialité »… L’entente était réciproque et nous n’avions pas envie de nous quitter car nous aurions pu poursuivre la conversation pendant quelques jours.

Je suis reparti les bras chargés de ses livres dont il m’a fait cadeau.

J’ai dîné aussi chez un personnage que j’apprécie beaucoup, Raj, l’éditeur de la très bonne maison d’Edition Kailash.

Sinon les journées à Pondichéry se sont passées, en une succession de mini cours avec des profs de l’AF et leurs étudiants. J’étais très amusé de voir, que la plupart des étudiants ne sont pas tamouls, (Pondichéry est dans le tamil Nadou) mais Rajpoutes. Ces garçons de 25 ans, viennent passer un an « en France », à Pondichéry pour apprendre le français et la culture française avant de repartir chez eux s’occuper des touristes français.

Tous les débuts d’après midi je m’offrais une heure de massages ayurvédiques, au milieu des chaudrons de cuivre remplis d’huile de bois de santal, de lait et de plein de choses délicieuses… je revenais en flottant le long des rues couvertes d’acacias, de fleurs et de murs peints à la chaux.

Pondichéry me plait mais je ne pense pas, si je devais y vivre, pouvoir y travailler et y être heureux. C’est une ville trop achevée pour moi.

C’est ce que je me suis dit lorsqu’hier j’ai repris la route en direction de Bangalore, au nord ouest. Tout de suite on retrouve le grand désordre de l’Inde qui m’enchante, la route traverse les rizières, et tout ce qu’on y voit donne le vertige. Les huttes de palmes, les couleurs de saris sur le vert électrique des pousses de riz, les paysans qui portent un cache sexe comme les égyptiens et les fesses nues dans les rizières, les vaches qui se précipitent sur la route, les camions avec des grappes de personnes allongées sur des bouteilles de gaz et la radio à tue tête, les motos avec des familles entières enveloppées dans des guirlandes de jasmin, les singes allongés au milieu de la route…

A une heure et demi de Pondichéry je me suis arrêté pour voir une ancienne ville fortifiée envahie par les singes. Je me suis promené dans des temples en ruines par 40°, sans touristes et accompagné par des grappes de singes. Les villageois viennent y faire la sieste, allongés entre les colonnes et les statues de Shivas dansants avec quelques bras en moins, et les lingams renversés (le dieu originel en forme de phallus).

A l’intérieur un prêtre faisait une cérémonie (un puja) pour une famille venue demander les faveurs d’Hanuman, le Dieu singe. J’ai demandé si je pouvais me joindre à eux, ce qu’ils ont accepté comme toujours avec plaisir, et j’y suis resté une heure, fasciné par ce qui se déroulait devant mes yeux.

Le temple est habité par un gros rocher noir dans lequel a été sculpté le Dieu singe à taille humaine, le prêtre torse nu, le couvre de pigments rouges, puis de guirlandes de jasmins tressées, de guirlandes d’oranges et de fruits en récitant des mantras, puis il a grimpé sur le rocher pour faire couler du lait sur la tête d’Hanuman. Le lait coule et se mélange au pigment rouge, qui ruisselle sur le corps d’Hanuman avant de s’écouler par une rigole à l’extérieur du Temple où les singes attendent pour recueillir et boire le lait rosé au creux de leurs mains. J’ai suivi tous les rites avec la famille qui se réjouissait de ma présence et m’expliquait comment m’y prendre. Les mains au dessus des lampes à huiles, la poudre de santal et les pigments sur le front, l’eau et le basilic sur le visage etc.

Ces moments m’émerveillent… ils me font accéder un instant, en contemplant ces rites envoûtant à toute l’énigme et la force des religions antiques.

Lorsque après une heure je suis ressorti de ce minuscule temple, j’ai retrouvé mon chauffeur qui courait avec un bâton, après les singes qui s’amusaient à emporter mes chaussures vers la rivière.

Nous avons roulé jusqu’à la nuit à Bangalore.

Changement de personnes et de travail.

Depuis ce matin je donne 7 heures de cours quotidiens à l’Université d’Art de Bangalore, et je suis logé dans un appartement de trois pièces dans un immeuble indien au milieu des familles et des ingénieurs de la Silicon Valley indienne.

En quittant la forteresse, alors que je cherchais la route d’un autre temple, nous avons abouti au bout d’un chemin au milieu des étangs et des rizières, où les femmes se lavent nues, devant un petit temple grand comme ma chambre, entouré de colonnes et d’une armée de singes.

4 novembre 2008

Padmini Chettur Kiran Rao TM Krishna Cinq jours,

Padmini

Padmini Chettur

Kiran

Kiran Rao

Krishna

TM Krishna

Cinq jours, où je n’ai pas pu prendre le temps d’écrire.

Chaque journée a été tellement dense que j’ai l’impression qu’il s’est passé plusieurs vies entre les deux.

Je suis arrivé avant hier soir à Pondichéry épuisé par les 5 jours de travail à Madras.

C’est à peine si j’arrivais à arracher quatre ou cinq heures de sommeil entre 3 heures du matin et 8 heures.

Dans la journée je photographiais mes modèles chez eux et le soir je réalisais leur portrait sur mon ordinateur. Entre les deux j’avais des rendez-vous au Park Hôtel, le magnifique Hôtel où aura lieu l’exposition le 2 décembre, pour organiser l’exposition. On cherchait jusqu’à la fermeture des laboratoires photo qui réalisent de bons tirages. Les derniers jours je n’avais tellement plus de temps pour traiter les portraits réalisés dans la journée que je travaillais dans la voiture, durant les heures d’embouteillages entre chaque rendez-vous.

L’arrière du 4x4 rouge qui me conduisait d’un rendez-vous à l’autre, était devenu mon atelier et labo photo ambulant. Shankar le très placide chauffeur qui m’a conduit pendant tous ces jours à travers Madras puis jusqu’à Pondichéry hier soir, m’aidait à tenir les câbles porter les piles de livres, et ce que j’adore en Inde c’est qu’au bout de 2 ou 3 heures il avait compris comment je procédais et il devançait chaque moment avant même que je ne me pose la question. Ca c’est la magie de la fluidité indienne et la capacité incroyable de prendre soin de l’autre. Je retrouve ce comportement qui allège tout plusieurs fois par jour.

Je ne peux malheureusement pas détailler chaque séance de photo, mais mercredi, jeudi, vendredi et samedi j’ai continué les séances avec chaque fois des personnalités singulières.

Sadanad Menon, professeur à l’Asian College of journalism., TM Krishna, chanteur Carnatic,

Padmini Chettur, danseuse contemporaine, Jean-François Lesage le célèbre brodeur de la Haute couture en France, Rose une animatrice TV, transsexuelle que je n’ai finalement pas voulu photographier car qu’elle m’énervait, (ca m’amuse avec le recul aujourd’hui), Kiran Rao directrice d’Amethyst, femme d’affaires, reine du glamour en matière de mode, décoration etc. et l’une de mes mécènes à Madras, Vandana psychiatre fondatrice de Banyan un système de soins psychiatriques à Madras et Leela Samson, ancienne danseuse classique de Barathanatyam directrice d’une fondation qui enseigne les Beaux-Arts dans un jardin au bord de la mer.

Tous ces moments étaient magiques, car ces personnes partageaient entre elles une modernité construite et basée sur une grande culture, très ancienne qu’ils réactualisent chaque jour par leur œuvre. Chacune de ses personnes, a voulu avant et après les prises de vues, me faire partager son univers.

Padmini Chettur par exemple, une danseuse contemporaine, très jeune, d’une grâce extraordinaire, qui est arrivée dans un superbe sari vert et lie de vin. Elle travaille avec les grands chorégraphes contemporains européens, et elle montrera son propre travail cet hiver au Théâtre des Abbesses. Nous avons parlé un long moment sous la véranda de musique électronique et de miniatures indiennes. Ce qui me surprend toujours chez les indiennes et les iraniennes, c’est ce supplément de féminité qu’elles ont. Ce supplément de féminité n’est pas une entrave, bien au contraire, il leur donne un côté aérien et une grande liberté très agréable à fréquenter.

Vandana, la psychiatre, qui ressemble à Lisa Minnelli jeune m’a reçu dans un sari rouge écarlate au milieu de ses statues antiques, et ses grands bouddhas. Elle m’a expliqué ses recherches sur la folie, sur les mutations de la folie en relation avec les mutations déstabilisantes de nos sociétés… la gestion de la folie féminine dans les couches populaires…

Je lui ai parlé des expériences réalisées il y a 4 ans avec Parimala, qu’elle veut rencontrer. Toutes les deux s’entendraient très bien.

Sadanad Menon m’a reçu dans sa belle villa traditionnelle face à la mer. C’est avec lui que le courant est peut-être moins passé. Trop politique, idéologique et paternaliste pour moi, bien que je pense que c’est un journaliste de grande qualité. Ceci dit le moment a été agréable, simplement je n’ai pas décollé comme avec les autres.

Krishna, le chanteur carnatic, beau comme un lion. Il a une voix de basse, est très imposant dans son longhi (rectangle de tissu noué autour de la taille qui se porte comme une jupe) blanc impeccable et sa kurta orange (tunique). Malgré ou peut-être grâce à cet aspect imposant il est en même temps profondément doux, généreux et attentif… nous avons discuté longuement dans son salon des différences de transmissions de l’enseignement artistique traditionnel et contemporain. Il m’expliquait ses convictions avec beaucoup de force puis m’écoutait avec l’humilité d’un enfant…

Avec Leela Samson, dont l’Ecole de Beaux-Arts est construite dans un jardin au bord de la mer c’était autre chose. Leela Samson, c’est toute la mesure indienne, toute la sagesse héritée de l’antiquité et la culture de l’harmonie. Tout est pensé dans ce lieu expérimental comme les japonais peuvent le faire autrement.

On marche dans un immense jardin, les dieux sont installés sous les banians, les cours ont lieu dans des amphithéâtres ouverts comme sous la Grèce antique ou dans l’Ecole de Tagore, Santiniketan au nord de Calcutta.

Le toit de l’auditorium est réalisé avec des palmes comme il y a 3000 ans.

Tout est végétal. Elle m’a présenté ses dieux préférés dispersés dans la propriété, dont un bouddha sculpté par la mer, et cet incroyable dieu Hindou homme dans sa partie droite et femme dans sa partie gauche.

Une américaine a voulu que je vienne visiter sa fondation, mais j’ai décliné son invitation pour garder en moi ce que me montrent les indiens et qui m’insuffle une énergie et un sens de la vie très précieux, car les indiens font circuler la vie. Les américains et à fortiori lorsqu’ils s’intéressent à des choses qu’ils ne connaissent pas, tuent en voulant préserver. Les Fondations des américains que j’ai visitées en Inde aussi modèles soient elles ne sont que le miroir angoissant de leur ego, chez les indiens la même chose devient un monde fluide de communication avec les mystères qui nous constituent.

Quelques moments dont je veux me souvenir aussi à Madras : Ranvir est un gujarati jaïn du nord de l’Inde, riche industriel et collectionneur. C’est lui qui organise et sponsorise mon travail à Madras avec l’AF.

Le dernier soir il m’a invité à venir boire un cognac dans sa maison.

Une immense villa en U, construite autour d’une piscine. Au centre de la piscine est construite une estrade pour les concerts de musique classique, dans le béton de magnifiques bas reliefs de singes courent sur les murs. Sur le toit une autre piscine avec un lingam contemporain. Nous avons discuté autour d’un cognac jusqu’à une heure du matin au milieu de ses collections de tableaux, de statues antiques et de livres.

C’était très intéressant de comprendre ce qui anime cet indien avec son T-Shirt de musique techno dans cette maison ultra moderne, habitée par le culte des œuvres anciennes.

Un autre moment dont je me souviendrai est lorsqu’un soir à 2 heures du matin un mannequin célèbre de la ville avec un physique boolywoodien éclatant, et une simplicité et une gentillesse stupéfiante chez quelqu’un de sa profession, m’a reconduit en moto de l’autre côté de la ville à mon hôtel.

Depuis deux jours, l’atmosphère n’a plus rien à voir avec Madras.

Je suis à Pondichéry, où le rythme est ralenti, tout est beau et charmant.

C’est un peu le St Tropez de l’Inde, mais c’est toujours l’Inde.

Je suis logé dans un ancien comptoir français, Villa Ophelia. J’ai à ma disposition 3 pièces avec de beaux meubles en teck, un lit à moustiquaire sous les ventilateurs, et trois fenêtres qui ouvrent sur un jardin de manguiers, d’hibiscus et de bougainvilliers. Lorsqu’on monte sur le toit on surplombe la promenade et on est face au golfe du Bengale.

Mon travail à Pondichéry est d’ordre plus pédagogique.

Ce soir dans 1 heure c’est le vernissage de mon exposition. Dans l’un des plus beaux lieux où j’ai exposé.

Un immense bâtiment colonial dont les colonnes blanches font face à la mer, rue Alexandre Dumas.

Je reviendrai dans quelques jours pour parler de Pondichéry et de ma halte au soleil couchant dans les temples de Mahalalipuram.

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29 octobre 2008

Le décor créé à Paris la semaine dernière et qui

Palais1

Le décor créé à Paris la semaine dernière et qui viendra accueillir les modèles, comme le décor d’un studio ambulant.

Mardi 28 octobre 2008

Me revoilà dans une situation familière : en train de travailler sur le bureau d’une chambre d’hôtel en Asie, avec des câbles, des photos prises dans la journée que je fais défiler et que je classe, un ventilateur bruyant mais que l’on entend à peine à cause des bruits nocturnes, et une journée dont les événements me filent entre les mains.

Cette fois j’ai décidé de ne pas écrire de blog, et puis la première journée passée je me suis dit, que si je ne le faisais pas ma mémoire serait tellement surchargée que cela me fatiguerait beaucoup plus que d’en écrire un.

Ce ne sera pas un blog-fleuve comme cela l’a été pour les précédents, en Iran, au Bangladesh, en Thaïlande ou d’autres fois en Inde… Je vais simplement le considérer comme un aide mémoire, en consignant brièvement quelques moments de la journée afin de vivre les journées suivantes délesté de ceux de la veille.

La somme de travail qui s’annonce impliquera de gros vides, mais je l’actualiserai quand je pourrai…

Je suis donc arrivé une nouvelle fois en Inde cette nuit à 1 heure 30.

C’est Diwali depuis 3 jours (la fête des lumières), et dans la nuit les rafales de pétards, de fusées, de feux d’artifices et les explosions donnent la sensation d’être dans une ville bombardée.

J’ai fait connaissance avec Marie-Paule la directrice de l’AF avec qui le courant est tout de suite passé, avec l’attachée culturelle de l’AF et avec le chauffeur qui me conduit à tous mes rendez-vous dans un 4x4 rouge, Shankar.

Ma chambre est dans un hôtel simple avec des murs blancs et un sol rouge, des couloirs de 60 mètres de long, des plantes vertes moribondes et des hommes en longhi qui balaient nonchalamment. Il fait chaud et moite, l’hôtel est entouré d’un jardin avec d’énormes arbres et des oiseaux et la vitesse des mouvements a été divisée par 8 ou 9 pour qui arrive de Paris.

Tous mes repas, déjeuners et dîners me sont offerts par une héritière fortunée dans une magnifique villa coloniale baptisée Amethyst, entourée d’un jardin.

D’après ce qui me semble avoir compris cette jeune femme a transformé l’une des villas familiale en club/café où l’on peut manger, travailler, lire etc. dans un décor très travaillé.

J’ai quelques lieux comme celui-ci en tête, avec les meubles en teck ciré, des photos colorisées au mur, les serveurs en blanc qui flottent sur le sol et dont je passe de longues minutes à observer l’élégance. L’élégance des femmes qui circulent en sari et le calme des hommes qui les accompagnent…

Cet endroit est un lieu parfait pour travailler.

Mon programme de prises de vue à Madras est dense. J’ai débuté aujourd’hui par l’une des plus grandes chanteuses Carnatic de l’Inde, que j’avais entendu un après-midi cet hiver avec Alain au Théâtre de la ville à Paris.

Je n’imaginais pas, bien que ce ne soit pas si improbable, la photographier quelques mois plus tard chez elle.

Ca a été un très beau moment. Elle nous a fait apporter gâteaux et cafés puis s’est installée entre les statues des Dieux qui habitent son salon et nous a offert un petit concert privé pendant qu’assis en tailleur face à elle j’essayais de capter avec mon appareil la suspension d’une émotion.

Ce qui était beau durant cette séance c’est que je n’étais pas en train de réaliser le portrait d’une chanteuse célèbre, mais d’une chanteuse en train de chanter réellement.

Au début nous avons un peu titubé, puis elle a cherché mon regard et en quelques minutes, 4 ou 5, elle a fait jaillir une émotion qui nous donné des frissons à tous. Son impresario, Marie-Paule et moi. Elle l’a compris, car elle a terminé son chant en éclatant de rire, parfaitement consciente de ce qu’elle venait de nous adresser.

Nous l’avons quitté en retrouvant la voiture au pied de son immeuble qui ressemble à celui du film Gomorha à Naples.

C’est cela qui me plait en Inde, je suis allé photographier à Calcutta ou à Bombay, au 11 eme étage d’immeubles remplis de motos, d’échafaudages abandonnés, d’escaliers écroulés et d’enfants qui font des acrobaties, de vieux artistes, amis de Picasso dans les 50’s, des cinéastes ou des écrivains, qui me recevaient dans de petits appartements douillets, entourés de leur bibliothèque, de leurs instruments, des statues de leurs Dieux, et de canapés couverts de beaux saris. Ce qu’ils ont en commun, c’est le plaisir affiché de partager ce moment, une reelle générosité, et en même temps qu’une grande conscience de soi, une vraie simplicité presque toujours dépouillée de vanité.

Nous avons poursuivi l’après-midi que je ne développerai pas en photographiant dans la rue, des vendeurs de perles de verre issus de la caste des gypsy, superbes de gentillesse et de dignité dans le soleil couchant.

Je me suis acheté un téléphone indien dans une boutique surpeuplée et nous sommes revenus en longeant le bord de mer.

Ce soir alors que je dînais sous les ventilateurs d’Amethyst, un homme que je n’avais jamais rencontré s’est avancé vers moi en criant en anglais, mais vous êtes Pascal Monteil !!!!??? Mon dieu je suis si bête de ne pas vous avoir reconnu… je ne comprenais rien. En quelques minutes, j’ai été invité à me joindre à une table, avec une jolie jeune fille tamoul qui me parlait en français impeccable du livre Douleur exquise de Sophie Calle, d’une dame âgée dans un sari extrêmement classe et les yeux entourés de Khôl, qui m’a été présentée comme le gourou du goût à Madras… et qui connaissait très bien Andrée Putman et la sœur de Bhumibol… la propriétaire des lieux une femme ronde avec un regard très franc, et ce monsieur dont j’ai appris au fil de la conversation qu’il avait une fondation…

Pendant la première demi-heure je ne comprenais rien à la situation, sans faire tellement d’effort pour comprendre, me laissant bercer par les rencontres du jour, la chaleur et l’alcool de gingembre qui nous a été servi pour accompagner un poisson grillé au citron.

Nous nous sommes quittés avec affection sans que j’avance beaucoup dans ma compréhension.

Je crois que c’est pour ça que je mets si peu d’empressement à mieux apprendre l’anglais. Parfois lorsque je suis fatigué ça me permet de flotter dans des situations où je ne sais pas bien de quoi on me parle, ni avec qui je parle, ni ce que va donner ce moment…

Ca n’empêche pas que les choses se passent, bien au contraire. Et personne semble m’en tenir rigueur. Ca me montre l’événement que je vis avec une sorte de distance poétique, où je regarde ce qui se déroule et auquel je participe en observant des détails auxquels je n’aurais pas prêté attention, des gestes, des rapports entre les personnes, des émotions sur le visage, qu’une conversation intelligible feraient oublier.

Je vais me coucher car il et une heure et demi du matin !

9 septembre 2008

10 PHOTOGRAHIES 30 x 40 cm et 12 PHOTOGRAPHIES 40,5 x 50,5 cm

Parimala_Inamdar

Parimala Inamdar 30 x 40 cm


Anne

Anne de Henning 30 x 40 cm

Marguerite_Duras

Marguerite Duras 30 x 40 cm

kyoto

Kyoto 30 x 40 cm

Calcutta__1926_

Calcutta (1926) 30 x 40 cm

Calcutta_Sudder_Street

Calcutta Sudder Street 30 x 40 cm

Phnom_Penh_3

Phnom Penh I    30 x 40 cm

Phnom_Penh_2

Phnom Penh II    30 x 40 cm

Phnom_Penh_1

Phnom Penh III    30 x 40 cm

Bhumibol

Roi de Thailande Bhumibol 30 x 40 cm

Nurul_Calcuttal

Calcutta, Nurul  40,5 x 50,5 cm

Marble_Palace

Calcutta, Marble Palace 40,5 x 50,5 cm

Satyajit_ray

Chittagong, Satyajit Ray  40,5 x 50,5 cm

 

Dhaka

Dhaka  40,5 x 50,5 cm

Andr_e_Putman

Andrée Putman  40,5 x 50,5 cm

Sharmeen_Husain

Sharmeen Husain 40,5 x 50,5 cm

Sultana_Nizan

Sultana Nizam 40,5 x 50,5 cm

Shumadri_Chaterjee

Chittagong Sumadri Chatterjee 40,5 x 50,5 cm

Gauthier_Boche

Gauthier Boche 40,5 x 50,5 cm

Bernie_Bonvoisin

Bernie Bonvoisin  40,5 x 50,5 cm

Amar_Arrada

Amar Arrada   40,5 x 50,5 cm

P_n_lope__P_tronille__Philom_ne__I_aki

Pénélope, Philomène, Pétronille, Iñaki 40,5 x 50,5 cm


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Exposition Spirit of the Cities
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